Les clauses attributives de juridiction sont fréquemment stipulées dans les contrats internationaux.

La clause attributive de juridiction consiste à donner compétence à un tribunal étatique pour régler les litiges découlant d’un contrat commercial international. Elle permet aux parties de désigner un tribunal qui sera compétent pour trancher leurs éventuels litiges.

Il n’est pas rare de constater que ces clauses ne font pas l’objet d’une attention particulière de la part des parties au contrat. Cependant, elles jouent un  rôle central puisqu’elles permettent de déroger aux règles de détermination de la juridiction compétente du droit commun.

Les clauses attributives de juridiction doivent répondre à certaines conditions pour être valables.

Lorsque le défendeur a son domicile dans un État membre de l’Union Européenne, ce sont les règles de droit communautaire qui s’appliqueront.

Le règlement Bruxelles I bis n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, reconnait la validité, sous certaines conditions, des clauses attributives de juridiction (art.25).

Les clauses attributives de juridictions s’appliquent à toutes les parties « sans considération de leur domicile », si les parties ont convenu d’un tribunal d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé. Dans ces conditions, c’est le tribunal de cet État membre qui est compétent. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

En ce qui concerne la forme, cette clause attributive de juridiction doit être conclue :

  • par écrit ou verbalement avec confirmation écrite ;
  • sous une forme, conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles ; ou
  • dans le commerce international, sous une forme, conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.

Le règlement précise que « toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite » (art. 25-2).

La clause attributive de juridiction doit remplir les conditions de validité suivantes :

  • il doit s’agir d’une situation internationale ;
  • la clause doit porter sur « des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé» (art.25.1) ;
  • elle ne doit porter atteinte aux règles de compétence exclusive, notamment celles en matière de propriété industrielle, concernant les litiges relatifs à l’exécution des décisions, ceux relatifs aux droits réels immobiliers et aux baux d’immeubles, ceux relatifs à la validité d’inscription sur les registres publiques ou encore à la validité, nullité ou dissolution des sociétés ou personnes morales (art.24) ;
  • elle doit être exclue en matière d’assurance, en matière de contrats conclus avec les consommateurs, et en matière de contrats individuels de travail (art. 10 à16, art. 17 à19, art. 20 à 23).

Il est important de souligner qu’en cas de pluralité de défendeurs, le règlement prévoit une règle de compétence spéciale. Une personne domiciliée dans un État membre peut être attraite devant la juridiction du domicile de l’un d’eux. Le règlement pose la condition suivante de cette règle: les demandes doivent être liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément (article 8-1). Mais la clause attributive de juridiction prévue dans le contrat prime cette compétence spéciale, susceptible d’être invoquée en raison d’une interdépendance entre des litiges qui impliquent plusieurs codéfendeurs. Ainsi, il a été jugé récemment qu’une clause attributive de compétence conforme aux dispositions de l’article 25 du règlement Bruxelles I bis crée une compétence exclusive au profit de la juridiction désignée et prime la compétence spéciale de l’article 8, § 1, concernant la pluralité de défendeurs (civ.1re, 14 mars 2018, n° 16-28.302).

Quant au choix du tribunal, il est nécessaire que le tribunal désigné soit un tribunal d’un État contractant. Aucune règle n’impose un lien entre le tribunal choisi et le litige.

Il est à noter que la clause attributive de juridiction est considérée comme autonome par rapport au contrat qui la contient, ce qui signifie qu’elle reste valable même si le contrat ne l’est pas (art. 25-5).

Cette clause est transmissible et peut donc être opposée aux tiers. C’est notamment le cas en matière de connaissement (Cass.com., 23 sept.2014, n°13-19.108).

En matière internationale, la seule convention, hors de l’Union Européenne, qui régit la clause attributive de juridiction, est la Convention de la Haye du 30 juin 2005 sur les clauses d’élection de for mais son champs d’application reste limité. En matière internationale, il est préférable de recourir à l’arbitrage.

En matière interne, contrairement au règlement Bruxelles bis, l’article 48 du code de procédure civil pose deux conditions de validité de la clause attributive de compétence. Elle doit être conclue entre deux sociétés commerciales et être rédigée de façon apparente.

En effet l’article 48 précité dispose que : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ». Il a été jugé qu’une clause attributive de juridiction est nulle lorsque la juridiction spécialement compétente est indéterminable (CA, 22 fév. 2019, n°17/14719). Cependant, cette nullité n’entraîne pas celle de l’ensemble de l’acte dans lequel la clause est insérée.

Ainsi, il est important d’être prudent dans la rédaction de ces clauses afin d’éviter tout risque. Il est nécessaire de veiller à la cohérence des clauses dans un ensemble contractuel : conditions générales, contrat commercial, factures etc. afin d’éviter des clauses contradictoires et donc un contentieux « parasite », porté sur la détermination d’un juge compétent. Il faut veiller également à la précision des termes de cette clause qui doit permettre d’identifier facilement la juridiction compétente ainsi que les litiges couverts par cette clause. Enfin, il convient de garder à l’esprit que choisir un tribunal étatique signifie choisir aussi la langue et les règles de procédure applicables devant ce tribunal.