En droit français, l’examen du litige au second degré par un deuxième tribunal arbitral a été envisagé par l’ancien article 1445 du CPC qui prévoyait que « la personne chargée d’organiser l’arbitrage peut prévoir que le tribunal arbitral ne rendra qu’un projet de sentence et que si ce projet est contesté par l’une des parties, l’affaire sera soumise à un deuxième tribunal arbitral…. ».

Dans cette perspective, les arbitres du premier degré rendaient un projet de sentences insusceptible de recours, et le recours pouvait valablement exercé contre une sentence définitive rendue par les arbitres du second degré, « sans pour autant créer une troisième degré de juridiction »[1].

La Cour de Cassation a été saisie de ce problème. Elle a alors donné une interprétation définitive au règlement d’un centre d’arbitrage parisien [2] qui prévoyait ce double degré: « l’examen successif du litige par deux commissions de la Chambre arbitrale ne constitue pas un double degré de juridiction, la commission du 1er degré n’instituant qu’un projet de sentence qui n’est transformé en sentence que s’il est accepté par les parties »[3]. En effet, la particularité est qu’il ne s’agit pas d’un réexamen de la décision rendue par le Tribunal Arbitral du premier degré, mais d’un réexamen du litige.

En ce qui concerne le projet de sentence, la décision peut être revêtue de la force exécutoire, si l’une des parties le demande à l’expiration du délai pendant lequel il est possible de demander la révision de l’affaire par un tribunal arbitral du second degré.

Ce type d’arbitrage est caractéristique de l’arbitrage interne français, mais aussi de l’arbitrage dit « de commodities» qui retrouve à son origine des groupements professionnels pour un certain type de commerce. L’arbitrage professionnel se caractérise par la procédure arbitrale qui comporte – dans la plupart de règlements des institutions d’arbitrage “professionnels” – deux degrés.

Tel est le cas de la procédure arbitrale organisée sous l’égide de la Chambre Arbitrale Maritime de Paris. Dans sa version en vigueur depuis le 16 juin 2022, c’est l’article XVII qui prévoir l’examen du litige au second degré pour une demande principale supérieure à 30.000€. Le Règlement de Chambre Arbitrale Internationale de Paris, dans sa version entrée en vigueur le 1er juin 2024, prévoit, aux termes de son Appendice 2, une procédure arbitrale à double degré en tant qu’option prévue par les parties.

Si l’arbitrage à deux degrés n’est pas usuel dans l’arbitrage international, il repose sur le consensualisme qui caractérise l’arbitrage, et ce double degré peut être utilisé en particulier dans les milieux professionnels spécifiques, tel comme les matières premières agricoles.

Aujourd’hui, on retrouver l’arbitrage à deux degrés dans d’autres institutions d’arbitrage professionnel à l’étranger, et l’un des exemples concerne le GAFTA (the Grain and Feed Trade Association), qui dans son règlement d’arbitrage n°125 prévoit « le droit d’appel ».

Une de principales caractéristiques de l’arbitrage est la vitesse dans la résolution du conflit et dans l’obtention d’une sentence arbitrale. De ce fait, cette rapidité est mise à mal avec un double degré d’arbitrage qui a pour conséquence d’alourdir la procédure arbitrale, mais aussi de ralentir l’obtention d’une sentence arbitrale définitive

C’est probablement l’une des raisons pour lesquels le nouveau droit français de l’arbitrage issue du Décret n°2001-48 du 13 janvier 2011 ne reprend pas cette procédure, répondant à des besoins spécifiques.

Ceci étant dit, l’avantage de cette procédure, qui peut être prévue contractuellement, est de rassurer les parties, leur laissant si besoin la « deuxième chance ».

Notes:

[1] E. Loquin « L’examen du projet de sentence par l’institution et la sentence au premier degré », Rev.arb., 1990, p.427

[2] Casss. 2e civ. 2 décembre 1964, Rev.arb.,1964, p13.

[3] Cass., 2e civ. 2 décembre 1964, Rev.arb., 1964, p. 13.