Le propriétaire a la jouissance du sous-sol qu’il est libre d’exploiter ou de faire exploiter conformément à l’article 552 du code civil qui dispose que « la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ». Une exception existe pour les substances de mines, définies à l’article L.111-1 du code minier, pour lesquelles le propriétaire n’a pas la jouissance. Seul l’Etat est compétent pour les concessions de mines.

Définition

Le contrat de fortage s’entend de la convention par laquelle le propriétaire d’une carrière, tout en conservant la propriété du sol et du sous-sol, concède à un exploitant le droit de l’exploiter ou d’extraire des matériaux du sol, moyennant le versement d’une redevance. Son objet est l’extraction des matériaux.

Qualification

Le contrat de fortage suscite souvent des interrogations.

Le contrat de fortage, qui concède l’activité extractive d’une carrière, est un contrat hybride. En ce qui concerne le terrain occupé, il s’analyse en un contrat de bail et, quant aux matériaux extraits, en un contrat de vente de biens meubles.

C’est la jurisprudence qui a qualifié le contrat de fortage comme un contrat de vente, notamment dans le cas où le contrat avait pour objet exclusif la cession du droit d’extraction de matériaux. Le raisonnement des juges est le suivant : puisqu’on ne peut pas louer les produits d’une carrière, le contrat doit être regardé comme étant translatif de propriété. Les juges précisent que « il ne peut y avoir de louage lorsque le preneur consomme la substance même de la chose objet du contrat » (Cass.3ème civ., 25 octobre 1983). Selon la Cour de cassation, ce qui justifie la qualification du contrat de vente est que le contrat donne au preneur le droit d’extraire et de disposer des matériaux extraits de la carrière.

Les juges avaient précisé auparavant que le contrat de fortage s’analyse en une vente de meubles par anticipation (Com.10 mai 1965 ; Civ.3E, 30 mai 1969). Rappelons que cette vente est définie à l’article 1601-3 du Code civil  comme un contrat : « par lequel le vendeur transfère immédiatement à l’acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l’acquéreur au fur et à mesure de leur exécution ; l’acquéreur est tenu d’en payer le prix à mesure de l’avancement des travaux…»

La jurisprudence a été conduite, pour l’élaboration de la définition juridique du droit de fortage, à distinguer, d’une part, les rapports entre les parties et d’autre part, les rapports à l’égard des tiers. Ainsi, dans les rapports entre les contractants, elle considérait ce contrat comme une vente mobilière (Cass.8 juill.1997, n°95-17.681) alors que dans les rapports vis-à-vis de tiers, elle qualifiait ce contrat en une vente immobilière (Cass.civ., 28 novembre 1949).

Dans les rapports entre les parties, par un arrêt du 8 mars 1957, la Cour de cassation a qualifié le contrat de fortage, de contrat de vente de matériaux et de meubles par anticipation dans ces termes : « La cession du droit d’extraire des pierres et des matériaux d’une carrière moyennant une redevance fixée d’après la quantité des matières extraites, qui comporte pour le cessionnaire le droit d’exploiter la carrière et de disposer des matières devenues meubles par extraction qui en est opérée, constitue, entre les parties, à raison de la nature et de l’objet du contrat, considéré au jour de sa réalisation, une vente de matériaux envisagés en leur état futur de meubles comme meubles par anticipation ».

Vis-à-vis des tiers, la jurisprudence qualifie la cession du droit d’exploiter de vente immobilière. En effet, elle considère que cette cession conserve une nature réelle et immobilière en ce qu’elle comporte une aliénation partielle et une diminution de la valeur du sol.

Dans certains cas, celle-ci qualifie le contrat de fortage comme un contrat de bail. Cette qualification est retenue quand le droit d’exploitation de la carrière s’accompagne de la location de constructions ou de terrains adjacents.

Le contrat de fortage oscille toujours entre la qualification de meuble par anticipation et la qualification de bail. Si les parties improprement nomment leur contrat, les juges peuvent le requalifier.

Par ailleurs, il faut distinguer les fortages sur le domaine privé de celui sur le domaine public. En ce qui concerne le forage sur le domaine public, le juge administratif a écarté la qualification d’un contrat de fortage en marché public des travaux (CA de Versailles, 23 février 2017), contrairement au Conseil d’Etat qui avait qualifié le contrat de fortage sur un terrain communal d’un contrat administratif devant être regardé comme un marché public de travaux (CE, 3 juin 2009).

Droit au renouvellement

Il est à noter que si la Cour de cassation a décidé que  le propriétaire d’une carrière peut, à l’expiration d’un contrat de fortage, s’opposer à son renouvellement. Pour le faire, il doit avertir l’exploitant par lettre recommandée avec avis de réception au moins un an avant l’expiration du contrat, à défaut de stipulation contractuelle relative aux conditions de renouvellement. L’absence d’opposition régulière du bailleur ne peut entraîner le renouvellement de plein droit du contrat de fortage (Cass.civ.3ème, 14 février 2007).

 

L’exploitant qui s’est conformé aux stipulations du contrat et qui a, par ses travaux ou ses investissements, apporté une plus-value au terrain, a droit à une indemnité due par le propriétaire si celui-ci poursuit l’exploitation ou cède son droit à un tiers.

 

Formalités obligatoires

Le législateur soumet le droit d’exploiter des carrières à l’obtention préalable d’une autorisation préfectorale. Le changement d’exploitant est également soumis à une décision favorable du préfet.

Redevance due par l’exploitant

L’article L.333-7 du code minier pose le principe suivant : « Le titulaire d’un permis exclusif de carrières est tenu de verser au propriétaire de la surface, indépendamment de l’indemnité d’occupation… une redevance ayant pour assiette le tonnage extrait.

La question s’est posée récemment de savoir si la redevance due par l’exploitant au propriétaire peut être fixée de manière forfaitaire. La Cour de cassation affirme  que l’article L. 333-7 du code minier exclut une fixation forfaitaire de la redevance de fortage en prévoyant qu’elle doit varier proportionnellement au tonnage extrait (Civ. 3e, 30 sept. 2021, n° 20-14.387).

Obligations en matière d’environnement

Le législateur prend en compte des considérations liées à l’environnement.

Le législateur oblige l’exploitant à réaliser une étude d’impact proportionnée à la sensibilité environnementale de la zone (art R.122-5 du code de l’environnement ). Cette étude d’impact comporte notamment une analyse de l’état initial de la zone et des milieux susceptibles d’être affectés par le projet, une analyse des effets négatifs et positifs induits par le projet et une analyse des effets cumulés du projet avec d’autres projets connus.

La jurisprudence ouvre également la porte à une action éventuelle en responsabilité du propriétaire du site contre la société à l’origine de la présence des déchets entraînant un risque de pollution (déchets industriels et ordures ménagères). (Civ.3e, 14 févr.2007, n°06-14.716).

A la fin de la réalisation des travaux, il sera nécessaire de procéder à la remise en état du site, le propriétaire et l’autorité administrative compétente (le plus souvent le préfet) devant être consultés par l’exploitant pour déterminer ensemble le mode de remise en état, en application de l’article R.512-39-2 du code de l’environnement.